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Mathurin Bako, Président de l’Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des Postes : La question de la qualité des services de communication...
 
Depuis quelques jours, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes a entrepris une campagne de mesure de la qualité des services offerts par les opérateurs de téléphonie. Dans cet entretien, le président de l’ARCEP, M. Mathurin Bako, explique le pourquoi et le comment.

Comment se porte le secteur des communications électroniques dans notre pays ?

Mathurin BAKO: 
Le secteur des communications électroniques se porte bien au Faso. Il a su impacter positivement tous les secteurs d’activités et est même devenu le moteur de notre économie nationale. Je vous donne quelques statistiques pour étayer ces propos. Au 30 septembre 2012, le parc d’abonnés au téléphone fixe était d’environ 141 635 contre 94 758 en 2006.

Quant à la téléphonie mobile, le parc d’abonnés des trois opérateurs confondus est de 9 695 027 alors qu’il était d’à peu près un million en 2006. C’est dire comment le secteur est dynamique. La connexion internet a elle aussi connu un bond quantitatif. Incontestablement, le secteur a connu un boum au delà des prévisions les plus optimistes.

Votre appréciation sur la qualité de service aussi bien pour la voix que pour les data

La qualité des services de communication est le principal défi de l’Autorité de régulation. En dépit des efforts faits par les acteurs du secteur, il y a encore des insuffisances dont la plus critiquée est la mauvaise qualité de service de communication. Les consommateurs se plaignent régulièrement et légitimement des difficultés qu’ils rencontrent à établir des communications de qualité.

A l’ARCEP nous en avons pleinement conscience et tous nos efforts sont mobilisés pour trouver une solution satisfaisante à ce problème. Cela passe par exemple par des campagnes de mesures de qualité de service des réseaux afin d’établir juridiquement et techniquement le respect ou non par les opérateurs des obligations de qualité de service. C’est la loi qui nous impose une telle démarche. Nous ne pouvons pas sur la base de notre estimation personnelle sanctionner les opérateurs. Il faut le prouver par des audits et des vérifications sur le terrain.

Quelle est la situation dans les autres pays de la sous région ?

Les autorités de régulation se rencontrent régulièrement et je dois avouer que la question de la qualité de service est une préoccupation commune. Pratiquement dans tous les pays de l’UEMOA par exemple, ce sont les mêmes récriminations. Pour me résumer, la qualité de service est à améliorer partout.

A quel objectif répond la campagne de mesures de qualité de services que vous avez entreprise ces derniers jours ?

Cette campagne d’audit et de vérification de la couverture et de la qualité de service des réseaux de téléphonie mobile a pour objectif d’une part, d’apprécier, sur une base comparative, la qualité de service des réseaux mobiles offerte aux abonnés par les opérateurs de téléphonie mobile et, d’autre part, de vérifier que les obligations réglementaires en matière de qualité de service sont bien respectées. La qualité de service testée concerne les réseaux de deuxième génération des opérateurs.

Les mesures techniques seront accompagnées d’une enquête de satisfaction clientèle qui permettra à la fois de valider la perception « technique » des performances des réseaux et de juger des efforts commerciaux et tarifaires de chaque opérateur. L’impact des rayonnements sur la santé sera également mesuré dans le cadre de cette campagne. Le contrôle du respect des obligations techniques prévues par les cahiers des charges des opérateurs mobiles concernera un échantillon de vingt sept villes et localités desservies ainsi que l’ensemble des treize axes routiers.

Pourquoi avoir attendu si longtemps avant de lancer cette nouvelle campagne ?

Non nous n’avons pas attendu longtemps. Rappelez vous que l’année dernière à la même époque, une campagne a été menée et a abouti à des sanctions contre les opérateurs. Entre deux contrôles, nous devons donner le temps aux opérateurs pour qu’ils procèdent aux correctifs des dysfonctionnements relevés au cours du précédent contrôle. Du reste, les décisions de sanctions donnaient trois (03) mois aux opérateurs à compter de la notification des décisions pour relever les manquements constatés.

Par ailleurs, nous devons respecter la réglementation des marchés publics qui nous impose des procédures assez longues pour le choix du consultant devant effectuer le contrôle. Entre l’adoption des termes de références et la sélection du consultant, il se passe dans le meilleur des cas six mois. C’est la raison pour laquelle nous avons lancé assez tard cette campagne de mesures.

Avez-vous l’impression que les opérateurs coopèrent pour cette campagne ?

Je peux vous rassurer que les opérateurs sont beaucoup plus dans une logique de coopération. Pour cette campagne par exemple, nous avons déterminé ensemble les méthodes d’audit et de vérification, de sorte que les résultats ne puissent pas être remis en cause. Dans tous les cas, les opérateurs ne peuvent pas faire autrement car ils comprennent que toutes les actions que nous entreprenons contribuent à assainir le secteur. Nous ne faisons qu’appliquer les textes réglementaires. Pour la bonne santé du secteur, nous sommes condamnés à travailler ensemble.

Que risquent les opérateurs en cas de non respect des cahiers des charges ?

En cas de non respect des dispositions des cahiers des charges, les sanctions sont graduelles. L’article 187 de la loi portant règlementation générale des réseaux et des services de communications électroniques au Burkina Faso dispose que « Lorsque le titulaire de la licence ou de l’autorisation ne se conforme pas à la mise en demeure dans le délai fixé par l’Autorité de régulation, celle-ci, en fonction de la gravité du manquement, peut :

a) soit imposer des mesures spécifiques visant à faire respecter les obligations découlant de l’autorisation ;

b) soit prononcer à son encontre une sanction pécuniaire dont le montant, proportionné à la gravité du manquement et aux avantages qui en sont tirés, est compris entre 1% et 2% du chiffre d’affaires hors taxe du dernier exercice clos ; le taux maximum est porté à 3% en cas de nouvelle violation de la même obligation.

La décision visée à l’alinéa précédent est assortie d’un nouveau délai fixé au contrevenant pour qu’il remédie à son manquement. » Comme vous le savez, l’année dernière, les opérateurs ont écopé d’une sanction entre 1% et 2% de leur chiffre d’affaires. Cette année, le taux passerait à 3% si d’aventure, les choses ne s’améliorent pas.

Un mot aussi sur votre campagne d’identification des abonnés à la téléphonie mobile ?

L’identification des abonnés à la téléphonie mobile est l’autre grand défi de l’ARCEP. Avec les opérateurs, nous avons fait le tour des principales villes du pays pour sensibiliser les distributeurs sur le danger de vendre des kits de connexion sans identifier le client. Nous avons également engagé une campagne de communication à travers la diffusion de spots publicitaires. Je pense que notre message est passé. Du reste, depuis le 1er octobre, les nouvelles puces sont non pré-activées. Le client ne peut communiquer qu’après une identification complète. Mais je voudrais saisir l’occasion pour appeler aux distributeurs et aux revendeurs qu’ils ne doivent pas baisser la garde parce que ce qui nous motive, ce sont les raisons sécuritaires, et je crois qu’ils peuvent et doivent comprendre cela.