bread crumps
Constitution burkinabè : Et voici les retouches du CNT !

Le Conseil national de la transition (CNT) est passé à l’acte sur ce sur quoi il était attendu par de nombreux Burkinabè : verrouillage de l’article 37 de la Constitution et suppression du Sénat. Mieux, il offre désormais la possibilité de la saisine du Conseil constitutionnel à tout citoyen et ‘’retire ’’ la présidence du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) au Président du Faso. C’était au cours de sa plénière de jeudi, 5 novembre 2015.

« Le Président du Faso est élu au suffrage universel direct, égal et secret, pour un mandat de cinq ans. Il est rééligible une seule fois. En aucun cas, nul ne peut exercer plus de deux mandats de Président du Faso consécutivement ou par intermittence ». Voilà la nouvelle version de l’article de la constitution qui tant fait jaser. Il a été voté par 88 voix « pour » sur les 89 votants. Mieux, l’article 37 passe désormais dans le cercle très fermé de l’article 165 de la loi fondamentale. Ainsi, faut-il comprendre qu’autant que la forme républicaine de l’Etat, le multipartisme, aucune initiative visant à réviser la durée du mandat présidentiel n’est recevable. Aussi, aucune procédure de révision ne peut être engagée ni poursuivie en cas de vacance du pouvoir, pendant la durée de l’Etat de siège ou de l’Etat d’urgence et lorsqu’il porte atteinte à l’intégrité du territoire national.

Voilà qui vient mettre fin à l’attente de beaucoup de Burkinabè pour qui, le premier acte du CNT devait être de procéder au verrouillage de cet article qui a déchaîné toutes les passions politiques ces deux dernières années et qui a conduit à l’insurrection des 30 et 31 octobre 2014. Mission accomplie donc pour Chériff Sy (président du CNT) et les siens qui n’ont pas manqué le moment pour réaffirmer leur volonté à porter les aspirations du peuple.
Un autre acte fort de cette plénière a été la suppression du Sénat qui, bien qu’inscrit dans la Constitution, n’avait pas pu être installé ; une partie des Burkinabè, notamment l’opposition politique, ayant en son temps marqué son hostilité à sa mise en place du « fait de son inopportunité et surtout son caractère budgétivore ».

L’autre retouche importante à relever est la possibilité désormais pour le citoyen de saisir le Conseil constitutionnel, contrairement à la formulation antérieure qui n’offrait ‘’réellement’’ cette possibilité qu’à une liste restreinte de personnalités. En clair, maintenant, le citoyen peut directement saisir l’institution soit directement soit via une procédure judiciaire.

La présidence du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) qui était, jusque-là, assurée par Président du Faso (un rattachement qui était mal perçu par les acteurs comme faisant obstacle à l’indépendance de la justice) connaît maintenant un détachement. Désormais, la présidence du CSM revient au Premier président de la Cour de Cassation et le président du Conseil d’Etat assure la vice-présidence du CSM. « Ce qui acte désormais la séparation des pouvoirs avec l’indépendance de la justice », analyse le député Aziz Sana, ajoutant que c’’est une recommandation des états généraux de la justice.

Une autre innovation est la constitutionnalisation de l’Autorité supérieure du contrôle d’Etat (ASCE), devenue, l’Autorité supérieure du contrôle d’Etat et de la lutte contre la corruption (ASCE-LC). Un acte qui donne à l’institution, une marge de manœuvre en matière de répression. L’institution se voit consacrée dans la Constitution avec pour implication d’être autonome et détachée du Premier ministère auquel il l’était jusque-là.

Pour Aziz Sana, il était important de ne faut pas oublier les conditions qui ont conduit à la mise en place de la Transition à savoir, entre autres, le manque de démocratie réelle, le bafouement des droits fondamentaux. D’où ces modifications pour encourager la démocratie, l’alternance et promouvoir les droits fondamentaux des citoyens burkinabè, dit-il. Ajoutant qu’au-delà des questions comme l’article 37 et le Sénat, « d’autres torts » étaient faits au Burkinabè telle l’impossibilité pour lui de saisir le Conseil constitutionnel. M. Sana a également salué cette autre disposition qui stipule que pour les questions soulevées par les députés, notamment celles relatives à la politique générale, le Premier ministre a obligation de venir devant la représentation nationale pour répondre à ces questions.
Aussi, revisite-t-il le mandat du président de l’Assemblée nationale est fixé à deux (pour donner l’exemple de l’alternance) et le CNT a également réaffirmé que l’Armée doit être républicaine.

Au cours de cette plénière, le CNT a aussi procédé à la prorogation de la Transition du fait du coup qui a entraîné le recul des élections couplées. La Charte ayant indiqué que la durée de la transition ne peut excéder douze mois à compter de la date de l’investiture du Président de la transition. Le Président Michel Kafando a été investi le 21 novembre 2014. D’où la nécessité de cet acte du CNT qui stipule que « la transition prend fin à l’investiture du Président du Faso. L’investiture du Président du Faso intervient dans les quinze jours suivant la proclamation des résultats définitifs de l’élection présidentielle. La nouvelle assemblée nationale est installée dans les sept jours suivant l’investiture du Président du Faso ».

Oumar L. OUEDRAOGO
Lefaso.net