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Halte aux discours belliqueux !
OPINION

« Nous allons être vigilants, les fraudes, les magouilles ne passeront pas parce que si on donne des résultats frauduleux, nous prendront le pouvoir par d’autres voies. Que cela soit compris. Nous sommes des démocrates, mais si on veut tromper le peuple une fois encore, alors là, je vous dis que le peuple sera débout et le peuple ira jusqu’au bout ».

Voici l’extrait du discours prononcé par Salif Diallo lors de a clôture du congrès du MPP. Sans doute, à cause de la fatigue des deux jours qu’il venait de vivre, il n’avait pas le temps de revenir sur la première fois où le peuple a été trompé. A partir de son discours en effet, on est en droit de le sous entendre, puisque la mise en garde, est on ne peut plus claire : « si on veut tromper le peuple une fois encore ». Quand et par qui le peuple a-t-il été trompé pour la première foi ? Ce sont des réponses qui peuvent intéresser le lecteur. Mais bref, là n’est pas le propos de cet article.

Bien des personnes interloquées par ces propos, extraits du discours de Salif Diallo lors du congrès du MPP, ont déjà avant moi, relevé que l’auteur aurait pu se passer d’un tel langage aux relents bellicistes. Après moult réflexions et analyses d’idées, je me joins à tous ceux-là, non pour condamner, mais pour attirer l’attention, sur le devoir de retenu nécessaire à avoir, surtout en cette période de turbulences socio-politiques dans notre pays.

Le discours de Salif Diallo, étonne par sa tonalité sourdement violente et en même temps, il détonne avec le ton apaisant qui a marqué la finale de son intervention où Salif Diallo dit que « quel que soit le temps que ça va prendre, nous irons à la victoire avec le peuple et pour le peuple ». Mais c’est peut-être mieux de bien s’afficher au lieu de biaiser. On ne peut pas revêtir l’uniforme d’un sapeur quand on est soi-même celui qui attise le feu.

Plus d’un parti politique au Burkina, ont déjà déclaré leur candidature pour 2015. En supposant que chacun d’eux s’adonne à ce genre de discours, ne courons-nous pas le risque de compromettre le climat de paix tant souhaité maintenant et après 2015, quand on sait que des joutes électorales, un seul candidat doit en sortir ? Pour mobiliser les troupes, est-ce vraiment nécessaire d’entonner des chants de guerre ?

On pourrait me rétorquer que selon le proverbe, « il n’y a pas de mauvaise parole, c’est l’intelligence qui travestit ». D’accord. Mais peut-être qu’il aurait été de bon ton d’expliciter ces moyens à prendre, pour accéder à Kosyam, si le MPP n’était pas vainqueur en 2015. Dans un pays où le combat se mène partout, même pour sa pitance quotidienne, tenir de tels propos peut incliner les esprits à la violence. Rien ne donne l’assurance, que ceux qui ont bravé les distances pour venir remplir la maison du peuple ou le stade municipal, entendent autrement ces paroles.

Dans les pays comme le Kenya ou la Côte d’Ivoire, où des leaders politiques ont usé de tels propos menaçants, il s’est trouvé que c’est la masse populaire qui en a payé les frais. Je pense personnellement, que procéder de cette façon, c’est entretenir du mépris pour cette tourbe vulgaire. Et si l’on a du respect pour elle, il ne serait pas intéressant, même si l’on est obnubilé par l’accession au pouvoir, de surfer sur un discours va-t-en guerre.

A un moment où tout le monde ou presque, a pris conscience que notre pays, à cause des hommes politiques, navigue en eau trouble, il serait bon de s’adonner à des discours conciliants et pacificateurs, pour réconcilier le peuple avec l’homme politique.

Ce que nous dénonçons vaut aussi pour les hommes des médias. Le contexte des 20 ans du génocide rwandais a encore mis en exergue les conséquences de la parole mal gérée. Le cas plus proche de la Côte d’Ivoire nous parle encore plus bruyamment et nous interpelle tous. Un tel discours offensif, émanant de la bouche de ceux qui devraient être la clé de voûte de la concorde nationale, à mon avis est inconvenant et ne devrait plus avoir droit de cité dans les discours à venir.

Yssouf Ninda